… ou comment les indépendants sont les grands perdants des politiques culturelles locales

Aujourd’hui, je vais vous parler d’un cas d’école assez révélateur concernant nos difficultés et l’absence totale de considération pour nos métiers.

Nous avions entendu quelques rumeurs sur l’arrivée d’un prochain salon du livre à Valence (Drôme) mais sans avoir d’informations fiables sur qui organise, quand, quels thèmes…

Le temps passait et, petit à petit, les informations arrivent dans la presse mais à des dates très proches de l’événement.

Une consœur a bien tenté de rencontrer des élus mais tous se refilaient la patate chaude et refusaient de la rencontrer.

Une autre a tenté d’avoir un stand et a essuyé un refus car la programmation était déjà bouclée.

Bref, quelques jours avant l’événement, on a découvert plusieurs choses :
– la date (week-end prochain) et le lieu (palais des congrès)
– les invités (UNIQUEMENT des personnalités connues issues du sérail médiatique parisien)
– le budget : plus de 100 000 € (d’argent public)
– les maisons d’édition représentées : que des grosses structures, certaines appartenant en plus à des milliardaires

Il n’y a pas une seule maison d’édition locale sur ce salon… Et quand je dis locale, je ne parle pas que de la Drôme mais je pense à une échelle régionale !

Avec quelques consœurs / confrères, nous avons tenté de tirer la sonnette d’alarme mais, hélas, rien n’a changé. Nos téléphones n’ont pas sonné, l’organisation ne s’est pas manifestée auprès de nous, les élu(e)s sont encore aux abonné(e)s absents.

Quel cahier des charges ?

Pourtant, quand on regarde un peu le cahier des charges du salon, nous sommes plusieurs à entrer dans les critères : livre de moins de 6 mois (bon, déjà, ça, c’est clairement un critère pour éliminer les petites structures) et livre traitant de l’actualité / essai / documentaire.

Si je regarde du côté de mon catalogue, Vivre en Macronie T7 est sorti en septembre 2024, il a donc moins de 6 mois, sa thématique est clairement sur l’actualité… Il coche toutes les cases. Enfin, peut-être pas, c’est de la BD, c’est indépendant et, en plus, c’est sur une autre ligne politique.
En revanche, avoir le bouquin des Grandes Gueules de RMC (émission réputée pour la qualité intellectuelle de ses intervenants) ou d’une personne citée dans le scandale du Fond Marianne, ça, ce n’est absolument pas un problème.

Mais, pourquoi est-ce que je vous dis ça ici et en quoi c’est révélateur de la crise que nous traversons ?

Parce que l’exemple que je viens de vous donner se retrouve un peu de partout en France.

Nous voyons des salons et festivals joyeusement arrosés d’argent public qui font principalement la part belle aux plus grosses structures éditoriales, délaissant tout une partie de la création.

Pour comparer, c’est comme si vous aviez un festival de musique vers chez vous qui ne fait pas venir un seul groupe local ou un salon de la gastronomie qui n’aura que des stands de géants de l’agroalimentaire. Et, pourtant, c’est ce qu’on a dans le monde du livre.

Donc, vous le voyez, alors que nos structures souffrent, nous constatons que les choix politiques et budgétaires partent plutôt pour favoriser, encore une fois, les structures les plus puissantes et mettre en avant des personnalités déjà vues et revues sur nos antennes. Alors oui, bien évidemment, pour attirer du public, il faut passer par quelques têtes d’affiche mais est-ce réellement nécessaire de n’avoir que ça ?

La question est posée.

 

Visuel : Affiche officielle de l’événement… avec un point d’interrogation sur l’utilisation de l’IA pour réaliser le visuel.

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